En finir avec la procrastination

Nous avons une perception et un usage du temps, qui nous sont transmis par notre culture. Notre personnalité et notre parcours de vie entrent également en jeu et déterminent pour chacun un rapport au temps personnel et intime, qui conditionne la manière dont on conçoit et organise notre temps. Certains ont une approche essentiellement monochronique du temps, qu’ils se représentent comme un schéma linéaire et compartimenté. D’autres le considèrent d’une façon polychronique, il devient alors flexible et multiple. Les premiers sont maîtres ès planification de tâches uniques, les seconds, sont multitâches et s’adaptent aux situations. À la croisée des horloges, certains d’entre nous évoluent dans un espace où le temps ne s’appelle pas Chronos, mais Crastinus (à demain). J’ai nommé le procrastinateur. 

Les procrastinateurs, des horlogers qui réinventent le temps

La procrastination définit une tendance plus ou moins marquée à reporter inutilement et systématiquement au lendemain ce qui devrait prioritairement être accompli le jour même. Ce trouble du comportement pousse les procrastinateurs à mettre en place des stratégies d’évitement d’une efficacité redoutable pour ne pas avoir à agir immédiatement. Cette propension à repousser en permanence à « plus tard » questionne naturellement notre rapport au temps. Pourquoi mettons-nous tant d’énergie à étirer le temps qui nous sépare de la mise en action ? Les plus grands procrastinateurs seraient des personnes très actives, qui ont un agenda de ministre. Impossible de les soupçonner de paresse. En fait, la procrastination serait liée aux émotions que nous pouvons ressentir face à une tâche à accomplir, et dans les formes les plus invalidantes, se transformer en véritable phobie. Peur d’échouer mésestime de soi, manque de confiance en soi… mais aussi peur de réussir, excès de zèle, perfectionnisme… 

Procrastiner ou voler du temps au temps

Les causes possibles de ce trouble trouvent leur origine dans des expériences de vie survenues pendant l’enfance
Les motivations qui nous poussent à procrastiner sont légion, mais elles parlent toutes d’un sentiment dont on cherche à se défaire. Et comme souvent dans les situations de stress, le résultat est inversement proportionnel à l’effet désiré. La plupart du temps, les causes possibles de ce trouble trouvent leur origine dans des expériences de vie survenues pendant l’enfance, et qui définissent nos tendances comportementales. Nous ne procrastinons pas tous devant les mêmes tâches et nous n’obtenons pas tous les mêmes résultats. Certains procrastinateurs sont même très motivés à travailler dans l’urgence et sous pression et démontrent que tout en procrastinant, ils restent motivés et sont capables d’accomplir leurs tâches dans les temps. On peut, dans ce cas, parler de procrastination positive. À ce sujet, cet article peut vous aider à y voir encore plus clair. Lorsque la pathologie conduit à des angoisses chroniques ou des états dépressifs, elle devient négative, et les personnes affectées peuvent émettre le souhait de sortir de ce cercle infernal. Il s’agira, alors, de comprendre les mécanismes psychologiques qui sont en action à notre insu, tandis que nous remettons des tâches au lendemain, parfois écrasé par la honte ou la culpabilité, ou au contraire, savourant le plaisir de s’être libéré de l’étreinte forcée de la contrainte. 

N’est-il pas grand temps d’en finir avec la procrastination ?

La procrastination serait liée aux émotions que nous pouvons ressentir face à une tâche à accomplir
Il conviendra dans un premier temps d’identifier les tâches qui créent des situations de procrastination pour en décrypter le sens. Sont-elles limitées à un domaine précis ? Se manifestent-elles dans la vie de tous les jours ? Dans un contexte personnel ou professionnel ? De même, en associant une planification réaliste de tâches à accomplir et un arbitrage objectif des priorités, le procrastinateur pourra créer un environnement moins anxiogène et faire face au temps de manière plus rationnelle, sans chercher à le manipuler. Pour les procrastinateurs qui s’accommodent de leur manie sans subir de lourdes conséquences sociales ou relationnelles, ceux qui ont pleinement conscience qu’ils ont du mal à mener des tâches qui les rebutent, ou ceux qui tirent bénéfice de la situation et y voient un processus de maturation, la lutte contre la procrastination consistera à veiller à ne pas laisser la situation empirer. Une veille… sans limites de temps ! 

Procrastiner n’est pas une fatalité et parfois même cela peut être positif. En prenant de la hauteur pour comprendre les mécanismes inconscients qui se jouent face à cette procrastination, il devient alors possible de les déjouer ou alors de trouver des alternatives à l’organisation de notre temps. Il arrive encore que des attentes trop élevées et une propension au perfectionnisme soient également la cause de cette constante remise à demain.

Quoi qu’il en soit, une meilleure connaissance de soi et de son fonctionnement sera la clef pour comprendre qu’il y a en chacun de nous un procrastineur qui sommeille. A nous de voir si l’on souhaite le réveiller ou pas !