Déculpabilisons-nous !

Il arrive parfois d’avoir le sentiment que plus nous lisons d’articles relatifs à la parentalité positive et plus nous nous culpabilisons. Plus nous prenons conscience de nos façons d’agir et de nos habitudes, et plus nous sommes tentés de refermer les livres et d’éteindre les conférences qui remettent en cause toutes nos méthodes d’éducation.

« C’est déjà tellement difficile sans lire ni chercher à s’améliorer alors si on complique encore plus les choses, non merci ! Je vais devenir dingue ! » « Comment voulez-vous que j’envisage une minute de penser à faire mieux alors que j’ai déjà la sensation de ne pas m’en sortir en agissant modestement, avec mes connaissances, mes moyens et le temps qui m’est imparti ? Et en plus, à quoi ça sert d’améliorer le bien-être des enfants si ce n’est à en faire des « enfants rois ! Nous sommes déjà beaucoup trop à l’écoute de cette nouvelle génération ! »

Voir les choses différemment

En fait, revoir ses méthodes ne consiste pas à faire davantage ou mieux, mais seulement à percevoir les choses différemment pour nous rendre la vie plus simple. En effet, les relations familiales s’apaisent et les enfants deviennent moins difficiles lorsque nous sommes plus à l’écoute de leurs vrais besoins, contrairement à ce que l’on craint généralement.

L’éducation bienveillante ne consiste pas à rendre les parents laxistes, ni à les faire culpabiliser, mais bien à les aider à placer le curseur de la bonne manière. Nous savons nous monter sévères ou tolérants, mais pas forcément au bon endroit, au bon moment et pour la bonne raison.

Notre société, nos habitudes, notre héritage nous poussent bien souvent à penser et à agir de manière inappropriée face aux enfants. Ce n’est pas parce que nous sommes de mauvais parents, mais bien parce que c’est nouveau pour la plupart d’entre nous. Il y a plusieurs années, les bébés étaient considérés comme de simples tubes digestifs et étaient opérés sans anesthésie, car on pensait qu’ils ne ressentaient pas la douleur. Les choses changent tant mieux !

Les parents de l’époque n’étaient pas plus idiots ni mauvais que nous, ils manquaient juste d’informations qui aujourd’hui inondent notre quotidien. Nos parents ne remettaient pas en cause, comme nous le faisons de nos jours, sous couvert de ces nouvelles compréhensions, l’éducation qu’ils avaient reçue.

Sans une revisite de leur propre histoire, la mise en place de certains outils sera laborieuse voire impossible.
Nous sommes de plus en plus nombreux à savoir et à admettre désormais que les enfants peuvent être élevés sans punition ni cri. D’autant plus si nous avons gardé de mauvais souvenirs de notre propre éducation. L’engouement pour la parentalité positive est donc la conséquence de plus de conscience et d’une volonté affirmée de vouloir donner le meilleur à nos enfants. Elle a cependant ses limites. En étant exclusivement tournée vers le bien-être des enfants, elle provoque deux frustrations majeures. La première, donner l’impression aux parents qu’ils ne savent pas répondre aux besoins de leurs enfants et que c’est de leur « faute » si les enfants sont violents, insolents, agressifs ou mal élevés ! La seconde frustration, et sans doute la plus sournoise, est que les parents qui n’arrivent pas à appliquer les outils dans leur quotidien, parce qu’ils perdent pied face à des situations stressantes, se sentent tout à coup nuls et incapables. Ils ignorent que ce n’est pas de leur faute et que sans une revisite de leur propre histoire, la mise en place de certains outils sera laborieuse voire impossible. C’est plus fort que soi ! Lire l’article « Marre de crier et de s’énerver, que faire ? ».

Cependant, il demeure de profondes croyances encore bien ancrées. De nombreux parents, dépassés dans leur rôle et submergés de difficultés auront tendance à croire que les enfants sont capricieux, colériques, ingrats… C’est pourquoi ils se disent : « Si en plus, il faut être gentil et respectueux avec eux ! C’est un comble ! » Sauf qu’ils confondent « enfants rois », c’est-à-dire des enfants à qui l’on ne pose aucune limite et à qui l’on ne refuse rien, avec les enfants respectés et simplement acceptés comme des enfants. Je vous conseille la lecture d’un article sur les enfants rois pour bien saisir la différence entre parentalité positive et parentalité permissive.

Les enfants peuvent devenir plus sereins et plus coopératifs à force d’être entendus et respectés.
Accepter qu’un enfant obtienne tout ce qu’il souhaite et accepter qu’un enfant refuse de manger un repas ou ne reste pas une heure sur une chaise ou encore pleure à l’idée de rentrer dans une piscine sont des choses différentes. Seulement, pensant bien faire, nous avons tendance à tout confondre et les enfants qui n’auront pas été respectés dans leur goût des aliments, dans leur peur ou encore dans leur agitation seront ceux qui deviendront des enfants que l’on dit « difficiles ». Aucun enfant ne deviendra jamais « docile », c’est-à-dire parfaitement obéissant, sans demande, sans colère, et sans émotion non maîtrisées, et ce, malgré toutes les méthodes positives ou non du monde. En revanche, les enfants peuvent devenir plus sereins et plus coopératifs à force d’être entendus et respectés. Si nous les respectons, nos enfants nous respecteront en retour.

Deux mondes différents

« Mes voisins disent pratiquer l’éducation positive et pourtant le comportement de leurs enfants est loin d’être exemplaire : pas de bonjour, ils courent dans tous les sens, le petit touche à tout, et le deuxième ne cesse de geindre. »

Nous pensons collectivement qu’un enfant est capricieux parce qu’il pleure, qu’il est sans gêne, qu’il touche à tout et irrespectueux parce qu’il ne reste pas assis sur une chaise ou refuse de dire bonjour à la dame.

En fait, les enfants n’ont jamais aucune mauvaise intention. Ils ne savent pas agir autrement que comme des enfants.

Alors que nous adultes, nous souhaitons anticiper, profiter du silence, discuter tranquillement, nous épanouir intellectuellement… Ce n’est donc pas le comportement de nos enfants qui pose problème, pas plus que notre mode d’éducation, mais bien l’équilibre à trouver entre nos besoins et les leurs ! C’est pourquoi cela s’avère souvent épuisant d’être parent et d’apprendre aux enfants à concilier leur monde avec le nôtre. Et encore plus lorsque nous-mêmes nous n’avons pas appris à répondre à nos propres besoins.

La quête de la perfection

Pour commencer à envisager des relations plus épanouissantes en famille, il convient de renoncer à ce que les choses se passent telles que nous les avions envisagées.  Comme toutes les relations, celle que nous avons avec nos enfants comprend des hauts et des bas. Vouloir la perfection et s’acharner à vouloir contrôler nos enfants est un mythe, le lâcher-prise est la clef. L’article « Pourquoi mon enfant n’obéit-il pas ? » sera un complément idéal à cette lecture.

Cela ne veut pas dire démissionner de son rôle d’éducateur, mais juste accepter que nos deux visions puissent forcément se heurter à certains moments. Parfois, nous réussirons à harmoniser les situations et à concilier nos besoins parce que nous serons en forme et apaisés. Mais d’autres fois, nous n’agirons pas comme nous aurions aimé le faire. C’est ainsi, inutile de se culpabiliser pour nos erreurs, tout le monde en fait, c’est humain.

Le plus beau cadeau à faire à nos enfants n’est pas de bien les élever, mais de travailler à notre propre bien-être.
Et si cela devient trop compliqué ou trop grave, nous pouvons demander de l’aide, trouver un relais ou encore décider de travailler sur nous. Élever un enfant est très difficile, il faut le reconnaître et s’il n’est pas facile d’appliquer les outils de parentalité positive, cela vient davantage d’un manque de connaissance de soi que d’un manque de compétence. Car, comment gérer les émotions de nos enfants lorsque nous ne savons pas gérer les nôtres ? Comment leur donner confiance et ne pas leur transmettre nos peurs lorsque nous sommes nous-mêmes aux prises avec ces émotions que nous ne parvenons pas à juguler ? Nous ne pouvons pas donner ou transmettre ce que nous ne nous donnons pas à nous-mêmes. Le plus beau cadeau à faire à nos enfants n’est pas de bien les élever, mais de travailler à notre propre bien-être pour être des parents responsables et bienveillants.

Dans notre société individualiste, nous pensons qu’il est aisé de gérer le quotidien seul. Or, nous oublions que dans le passé, les grands-parents, les voisins ou encore l’entourage pouvaient aider les jeunes parents, ce n’est plus le cas aujourd’hui. À peine sorti de la maternité, nous nous retrouvons seul, sans mode d’emploi, souvent épuisé par des rythmes auxquels nous ne sommes pas du tout habitué. Et, par crainte du jugement et du regard des autres, nous n’osons pas en parler. Alors nous nous culpabilisons de ne pas arriver à faire face croyant être les seuls à ne pas nous en sortir.

Pourtant, c’est le quotidien de nombreux parents, car il est normal, surtout les premières années, de ne pas voir le jour. S’occuper d’un très jeune enfant est épuisant et même s’il est vrai que c’est beaucoup de bonheur, c’est aussi beaucoup de stress, de doutes, de craintes, de tâtonnements et de chamboulements.

Un proverbe africain dit qu’il faut tout un village pour élever un enfant, c’est vrai. Alors, ne mettons pas la barre trop haute, acceptons les faux pas et reconnaissons-nous comme des apprentis parents en devenir qui font de leur mieux avec les moyens dont ils disposent. Ne cherchons pas à être parfait mais à faire de notre mieux ! Nous ne serons jamais des parents parfaits, mais nous pouvons tous devenir des parents responsables !

La culpabilité est un poison qui empêche de progresser et qui est bien souvent à l’origine des colères et des découragements. Alors, rappelez-vous que vous faites toujours pour le mieux et que chaque petit pas est une victoire. Le fait de lire, de vous remettre en cause, d’avoir conscience de vos agissements bons ou mauvais est déjà un énorme progrès. En prenant la responsabilité de vos attitudes, en cessant de faire peser sur vos enfants votre désir de perfection vous serez peu à peu libéré de la culpabilité, car vous êtes déjà le meilleur parent pour votre enfant. Lui vous aime tel que vous êtes, à vous d’en faire autant !

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