Sans fessées, impossible qu’il comprenne

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Les fessées et les châtiments corporels sur les enfants les aident-ils finalement à être plus respectueux, à éviter de devenir des enfants rois ?

Je réponds à la question posée par Floreessenceenergies sous une de mes vidéos qui me dit : «Je n’ai jamais reçu de punition, j’étais une enfant très calme et pourtant je hurle sur ma fille qui répète ce que je dis sans s’arrêter même après des fessés. La douceur, la reformulation, je compte, j’essaye. Rien. Que c’est dur ! Elle ne comprend qu’avec des gestes qui lui font mal finalement.»

Alors est-ce que vous aussi vous vous dites que votre enfant ne comprend finalement qu’avec des gestes qui lui font mal, c’est-à-dire des coups ou des brutalités quelles qu’elles soient ? Alors déjà je remercie cette maman d’avoir eu le courage de poster cette question. Nous ne sommes pas là pour juger, surtout pas moi parce que je pars d’un principe très simple : c’est que les parents qui frappent, et c’est le cas de cette maman visiblement, pensent que ce qu’ils font est pour le bien de leur enfant. A moins d’avoir un problème psychiatrique, aucun parent ne se lève le matin en disant je vais les frapper ce matin et ça va leur faire les pieds. Quand on hurle ou quand on frappe, ou quand on punit, quand on menace, quand on dit des mots blessants, à ce moment-là, soit on est dépassé par son sa colère, on est mal nous-même, on ressent un sentiment d’impuissance, on est touché par ce que fait notre enfant et donc les mots dépassent nos pensées à cause de la colère. Ou alors on est convaincu que ce mode éducatif est le bon.

Je voudrais revenir sur plusieurs choses que dit cette maman dans son message. Elle dit qu’elle n’a jamais reçu de punition et qu’elle était une enfant très calme et que pourtant elle hurle sur sa fille. C’est difficile de poser un diagnostic sans avoir un échange avec cette maman. Mais il est possible que si elle était très sage c’est peut-être parce qu’elle s’est soumise au point d’être la petite fille sage parce qu’elle avait tellement peur que ses parents ne l’aiment pas, la rejettent ou autre, que finalement elle a nié ses propres émotions. Elle n’a pas pu les exprimer. Et donc elle a nourri énormément de colère intérieure qui, aujourd’hui, fait qu’elle hurle sur sa fille. C’est vraiment le syndrome de la petite fille sage. Parfois c’est parce qu’on a un frère ou une sœur qui en fait voir de toutes les couleurs aux parents et donc on n’ose pas nous leur en rajouter et on accepte des choses sans rien dire. Et donc on se nie et on nourrit de la colère contre soi-même de ne pas oser s’affirmer. Ou alors on joue un rôle et on s’enferme dans un costume qui finit par devenir très étroit et nous faire péter un câble. Voilà ce qui peut se passer.

Revenons à la question et à sa fille qui répète ce que dit sa maman, sans s’arrêter, même après des fessées. Comme quoi ça ne marche pas si bien que ça. Parce que si la fessée faisait qu’après l’enfant se comporte parfaitement, ce serait une preuve scientifique. Si tous les enfants arrêtaient de reproduire un mauvais comportement quand on les frappe, on se dirait  finalement que ça marche super bien. La vérité c’est que ça ne marche pas du tout. Ce qui peut marcher c’est qu’à force de frapper un enfant, ce dernier, parce qu’il a peur qu’on le frappe, parce que ça fait mal ou que c’est humiliant, va redouter la réaction de son parent et il va mettre en place des stratagèmes. Ça peut être de la dissimulation, du mensonge, de la manipulation. Et on va leur en vouloir en disant qu’ils sont fourbes ou autre, mais sans comprendre que c’est nous qui les avons  formaté d’une certaine manière pour qu’ils se comportent autrement. Je ne vais pas vous parler des études qui ont été faites sur la fessée. Mais aujourd’hui il faut quand même savoir qu’il y a une loi qui conduit au pénal si l’on frappe un enfant. Je ne suis pas pour la répression des parents. Je pense que ce n’est pas dans les prisons ou les tribunaux qu’on va aider les parents qui ont de fortes colères ou qui ont des gestes violents avec leurs enfants à changer. Je pense plutôt que c’est en leur donnant des outils, en les accompagnant que ça va changer. Si on frappe un parent qui frappe, ça ne va pas l’aider à frapper moins. Néanmoins il y a quand même une loi qui entérine quand même le fait que c’est grave. Quand on frappe un animal ou une personne âgée, ça s’appelle de la maltraitance. Quand on frappe un enfant, on voudrait que ça s’appelle de l’éducation alors que c’est aussi de la maltraitance. Ayant été moi-même une enfant battue, je sais mieux que personne que ce n’est pas ça qui m’a aidé à devenir une enfant respectueuse, une enfant bien dans mes baskets, une enfant qui avait confiance en elle. Ça m’a humilié, rabaissé, ça a créé chez moi énormément d’angoisses, de peurs, de stress et de honte à l’idée que ça se sache à l’extérieur des murs de ma maison. Et je sais aussi, en tant que coach, les dizaines d’années qu’il m’a fallu pour me sortir de mes schémas. Mais il restera toujours des blessures profondes, tant physiques que psychologiques, qui sont le fruit de maltraitance.

Les études sur la fessée ont montré qu’elle est inutile et qu’en plus elle dévalorise énormément l’enfant, qu’elle fait baisser l’estime de lui, la confiance en soi, voire développe certains troubles. Quand on agit avec violence sur un enfant, on ne lui enseigne pas le respect, on lui enseigne la violence. Encore une fois, je ne cherche pas à juger, j’essaie juste de faire comprendre ce qui se joue réellement. Cette petite fille ne comprend pas quand on lui fait mal. Mais elle se soumet quand elle a mal parce qu’elle veut que ça s’arrête. Personne ne veut avoir mal. On ne peut pas résister très longtemps à la maltraitance. Donc on se soumet. Mais comme ça nous met en colère, ça va être encore pire. Les crises vont devenir deux fois plus importantes. Et que va-t’il se passer à l’adolescence quand l’enfant va prendre conscience qu’il a le pouvoir, lui aussi, d’exercer de la violence?  Ce sera violence contre violence. Parce que c’est ce qu’on lui aura appris. Quand on est dépassé par le comportement d’un enfant et qu’on le frappe, on lui explique que quand on est dépassé par les comportements de quelqu’un on le frappe. Et plus la maltraitance est forte, et plus il y a de la violence. Je vous conseille les travaux de Alice Miller (Child abuse and Mistreatment). Elle a étudié le passé de tueurs en série, de personnes  extrêmement violentes qui ont en commun d’avoir eu une enfance de maltraitance. Ça ne veut pas dire qu’on est condamné. J’ai fait d’autres vidéos sur comment régler les problèmes de son passé. Néanmoins il ne faut pas se dire que c’est anodin. Il faut le comprendre, pour moi c’est fondamental. Si je fais ces vidéos c’est pour aider les parents justement à avoir d’autres comportements avec leurs enfants. Je n’ai frappé aucun de mes trois enfants et ce ne sont pas des tyrans. Elles ne sont pas parfaites non plus mais ce n’est pas pour ça que je n’arrive pas à obtenir les choses. Et ce ne sont pas non plus des enfants faciles tel qu’on voudrait le dire, pas du tout. Alors bien sûr cette éducation là est plus lente, elle demande aussi un petit peu plus de self-contrôle et de patience. Mais elle porte ses fruits. 

Quand cette maman parle de douceur, de reformulation, quand elle dit je compte, j’essaie, mais que c’est dur j’ai beaucoup de compassion. Aujourd’hui c’est dur d’être parent. Il devrait y avoir des cours d’éducation des parents avant d’avoir des enfants; on devrait les préparer à ce qui les attend. Or les parents ne sont pas prêts. Ils fantasment une idée de la famille et de la paternité ou de la maternité. Parfois c’est vrai que c’est facile. Certains enfants sont plus faciles que d’autres, on ne va pas se mentir c’est vrai. Il y a des caractères évidemment et certains enfants expérimentent davantage, ont un besoin de bouger plus fort, sont plus agités. Il faut faire avec. Et on n’est pas préparé à ce à quoi nous allons devoir faire face. Et nous allons devoir faire face à quelqu’un qui va nous pousser dans nos retranchements, qui va user notre patience jusqu’au dernier millimètre. Oui c’est difficile d’être parent. Mais ça a plein de très bons côtés aussi et heureusement. C’est autant formidable que c’est difficile en fait. Ce n’est pas une épreuve facile. Je  compatie avec les parents. Et c’est d’autant plus difficile dans nos sociétés où la maman souvent travaille, a plein de choses à faire et doit en plus gérer le quotidien ou la logistique avec les enfants; dans un monde où, on le sait, la charge mentale est quand même supportée très majoritairement par les femmes. Donc oui c’est difficile. Mais il ne faut pas oublier pourquoi on a fait des enfants, quelle relation on veut avoir avec eux plus tard, qu’est-ce qu’on est en train de transmettre comme valeur. Qu’est-ce qu’on veut leur donner comme souvenir, de quoi veut-on qu’il se souviennent et qu’est-ce que l’on veut pour nos enfants : qu’ils soient soumis ou qu’ils s’épanouissent. Que veut-on offrir au monde? Parce que ces enfants-là sont les bâtisseurs d’un monde humaniste je l’espère. Et moins il y aura de violence dans les foyers et moins il y aura de violence dans le monde plus tard évidemment. En tout cas, ça me paraît évident.

Je ne détiens pas la vérité et je n’ai pas la science infuse. Je ne vous demande pas d’être d’accord avec moi mais d’essayer simplement. Et si c’est trop difficile pour cette maman, faites-vous accompagner, parce que parfois il faut aller chercher de l’aide. Si je suis malade, que j’ai essayé de prendre du paracétamol ou un anti-inflammatoire et que ça n’a pas fonctionné, au bout d’un moment je vais chez le médecin, je cherche une autre solution. Et c’est peut-être ça la voie.