Les dangers d’une éducation permissive

On me demande souvent pourquoi ce n’est pas bien d’avoir une éducation permissive. On ne sait pas toujours, en tant que parents, où mettre le curseur. Souvent, quand on a eu des parents très autoritaires, très durs, très stricts, on n’a pas envie de reproduire cette éducation avec nos enfants. C’est aussi peut-être pour ça qu’il existe autant de soucis dans l’éducation au 21e siècle.

On ne va pas parler de l’éducation dite positive dont on entend tant parler. On va parler à l’inverse d’une éducation permissive. Pour moi ce sont deux choses très opposées. J’ai déjà fait des vidéos pour donner les limites de la parentalité positive avec laquelle je suis d’accord sur les principes, mais pas toujours sur la manière dont elle est pratiquée, enseignée et proposée aux parents.

Je ne suis pas pour une éducation traditionnelle telle que ma génération et/ou peut-être la vôtre l’ont connu, avec le parent qui est là-haut et l’enfant qui est en bas. En revanche, je ne suis pas pour non plus une égalité évidemment, parce que nous ne sommes pas égaux avec nos enfants. Je suis pour des règles, je suis pour des limites, je suis pour des conséquences négatives. En revanche je suis contre toute forme de violence éducative, quelle qu’elle soit. Je pense qu’on peut tout résoudre et créer de meilleures relations avec nos enfants en ayant une éducation qui soit différente. Or cette éducation-là est souvent mal comprise, mal interprétée. J’ai là aussi fait des vidéos sur ce sujet mais je n’ai jamais parlé des conséquences d’une éducation qui serait trop permissive. Et l’éducation permissive c’est pour moi ce que les parents font quand ils n’ont pas vraiment bien compris ce qu’était l’éducation positive ou ce qu’était une nouvelle éducation. Alors voyons tous les travers de cette éducation.

Manque de responsabilité de l’enfant

Premièrement une éducation trop permissive ne va pas permettre à vos enfants de comprendre ce qu’est la notion de responsabilité. Pourquoi ? Parce qu’il est important que nos enfants se rendent compte des conséquences de leurs actes et prennent la pleine mesure de leur responsabilité. Or en étant trop permissif, en les laissant faire tout ce qu’ils veulent, en ne reprenant pas vraiment notre rôle d’éducateur qui n’est pas facile certes surtout à doser, quand on laisse les enfants manger à l’heure qu’ils veulent, se coucher quand ils veulent ou alors regarder plusieurs fois des dessins animés, faire un petit peu comme ils ont envie, et bien ça les prive de se rendre compte qu’il y a des choses qu’on ne peut pas faire. Résultat, ils peuvent avoir du mal à comprendre quel est l’impact de ce qu’ils font dans la vie des autres. Par exemple, un enfant qui tape et à qui on dit rien, ne peut pas se rendre compte que quand il frappe il fait mal et qu’il peut faire un autre choix qui est de ne pas frapper. L’éducation ce n’est penser que l’enfant oui bon il frappe mais il le fait pas exprès, peut-être que…, on laisse faire et puis quand il est un peu grand, là on n’accepte plus. L’éducation c’est tout de suite et dès les premiers instants. Il faut dès le début fixer des règles, des limites et faire respecter des valeurs dans votre éducation.

L’enfant aura du mal à gérer ses émotions

La deuxième chose c’est que les enfants ont du mal à gérer leurs émotions parce que quand l’éducation est permissive, on ne laisse pas l’enfant être frustré. Souvent on répond à ses besoins mais on ne répond pas qu’à ses besoins. Répondre aux besoins d’un enfant c’est normal. Mais nous ne sommes pas là pour répondre à ses envies et ses désirs. Parce que votre enfant a plein d’envies et plein de désirs. La différence entre un besoin et une envie, un désir c’est que le besoin est vital, c’est fondamental. Si votre enfant est sale, vous ne pouvez pas le laisser sale. Si il a faim, vous devez le nourrir. Si il a sommeil, vous devez le laisser se coucher. Si il a besoin de réconfort et de câlins, vous devez le rassurer. Si il se sent mal, vous devez le sécuriser. Ca, ce sont des besoins fondamentaux qu’il faut absolument combler chez votre enfant ou l’aider à combler. On doit également lui apprendre à combler ses besoins quand il est capable de le faire lui-même. En revanche, quand votre enfant veut un nouveau tour de manège, regarder plus de dessins animés ou votre téléphone, se coucher plus tard, jouer avec quelque chose qui n’est pas autorisé, ce sont juste des désirs et des envies. Et vous n’avez pas à assouvir cela ou à vous sentir coupable de ne pas pouvoir assouvir ses désirs ou ses envies. Et vous n’avez pas à y répondre en vous disant il est malheureux parce qu’il pleure. Un enfant qui pleure ne pleure pas forcément parce qu’il est malheureux. Il pleure parce qu’il est frustré et qu’il n’a pas eu ce qu’il voulait. Ce n’est pas un pleur qui génère du malheur. C’est juste une frustration, un stress que votre enfant évacue en pleurant. Si vous arrivez chez le marchand qui a la dernière paire de chaussures dont vous rêvez depuis des mois et que, au moment où vous arrivez, la personne avant vous prend cette paire de chaussure, vous n’allez pas pleurer et taper des pieds dans le magasin parce que vous l’avez pas eu. Ce que vous allez ressentir et la même chose que ce que ressent votre enfant quand vous lui dites NON. De la frustration.

Si votre enfant n’a pas l’habitude de laisser aller ses émotions pour savoir les comprendre et comment les juguler, il va grandir sans ce savoir. Et on le voit dans des cas extrêmes où la permissivité est totale, les enfants à l’adolescence vont avoir plus de conduites à risques. Ils vont pousser les limites encore plus loin, à tous les niveaux. Parce qu’ils ne savent pas, on ne leur a jamais appris et c’est vraiment le rôle de l’éducateur d’être ferme et strict sur le sujet.

L’enfant aura des problèmes de comportement

Troisième chose: il va y avoir des problèmes de comportement. Je viens d’évoquer les conduites à risques. L’enfant va faire n’importe quoi. D’ailleurs souvent moi je vois en accompagnement individuel des parents être vraiment choqués du manque de reconnaissance de leurs enfants. Mais en réalité, puisque tout est normal, il n’y a même plus de reconnaissance. L’enfant ne sait même pas se rendre compte qu’il a de la reconnaissance parce que c’est un sentiment et comme il a l’habitude que tout est facile ou que s’il trépigne un peu, s’il fait du chantage, s’il insiste, s’il ne vous parle plus pendant une semaine vous allez finir par céder. Et en réalité ça l’insécurise profondément. Résultat, votre enfant va avoir des problèmes de comportement, qu’on voit souvent se préciser assez vite dans la vie d’un enfant mais encore plus à l’adolescence, puisque plus il va grandir et plus il va prendre le pouvoir et plus ça va être compliqué pour vous. D’où l’intérêt de bien faire les choses très tôt. Donc si on ne veut pas ça il va falloir mettre le curseur ailleurs. Regardez mes autres vidéos.

L’enfant aura une faible estime de soi

La quatrième chose que l’on ne voit pas toujours, c’est que ça va entraîner une faible estime de votre enfant. Parce que votre enfant ne va pas continuer à vivre sous votre toit, il est au contact d’autres personnes et il se rend bien compte que les codes qu’il a à la maison ne sont pas les mêmes que les codes qui se développent ailleurs. Donc il peut être rejeté, il peut même être harcelé, il peut être aussi vu comme quelqu’un de capricieux à qui il faut tout faire et donner, et ça, ça ne marche pas avec tout le monde. Résultat il peut avoir une faible estime de lui parce que il n’est pas accueilli comme il aimerait l’être. Surtout à l’adolescence où on a tellement besoin d’appartenir à un groupe. Mais également il se rend compte, parce qu’il n’est pas idiot, que ce qu’il fait n’est pas bien, que le jeu de manipulation qu’il utilise ne l’aide pas à faire gonfler son estime de soi. Parce qu’au fond de lui il se culpabilise, et il en a honte, il n’est pas fier de ça. Ca permet d’assouvir ses désirs comme on l’a vu mais ça ne le rend pas fier pour autant.

L’enfant aura un manque de direction

Et enfin dernière chose, ça ne va pas les aider à avoir une structure. La vie est faite de discipline et nous vivons dans un monde où il y a des règles et des limites qu’il faut accepter très tôt justement. Je pense que l’éducation nous prépare aussi à ce qu’il faut attacher sa ceinture, payer à temps ses impôts, ne pas se mettre tout nu dans la rue, ne pas frapper quelqu’un, etc. Or ces enfants manquent de structure. Ils ne savent plus si obéir à des ordres c’est bien ou pas, si obéir à des règles c’est juste ou pas. Est-ce que je dois me rebeller par rapport à elle ou pas ? Quelle est ma position ? 

L’enfant ressentira de l’insécurité

Et puis aussi votre enfant est complètement insécurisé et ça c’est le sixième point. C’est à dire qu’un enfant se rend bien compte qu’il ne doit pas avoir le pouvoir sur ses parents. Ce n’est pas normal et il le sait. C’est vous le parent et il doit respecter les règles que ce soit au sein de la famille ou que ce soit au travail, puisqu’on est des êtres sociaux faits pour vivre ensemble les uns et les autres. Il est important de se respecter mais aussi de respecter les autres. Or si cet enfant n’a pas appris déjà à la maison à respecter ses parents, les règles, les limites, et bien il sera bien difficile pour lui, on l’a vu dans tous les points que j’ai évoqués, d’évoluer sainement dans la société. Et puis ça va créer chez lui beaucoup d’insécurité parce qu’il se rend compte que ce n’est pas normal qu’il aille si loin et que ce pouvoir qu’il croyait avoir, il voit bien qu’il ne l’a qu’à la maison et qu’ailleurs c’est difficile.

Il y aura donc deux options : soit il va devenir un bourreau pour les autres en essayant d’exercer encore son pouvoir, et on peut parler des hommes qui frappent leur femme ou de ces patrons qui ont besoin de s’imposer par la force, ou alors ça va se retourner contre lui et ça va faire de lui quelqu’un qui, en société, va s’écraser, qui va s’éteindre et qui va peut-être à son tour subir les assauts de quelqu’un d’autre.

J’espère que cet éclairage vous permettra de comprendre à quel point il est important de fixer des règles, de fixer des limites, d’avoir des valeurs et de les faire respecter par vos enfants, de ne pas chercher à être leur ami mais être leur éducateur. Et que le rôle d’un éducateur ce n’est pas d’assouvir les envies et les désirs de vos enfants mais de les aider à combler leurs besoins et de devenir des adultes responsables, des adultes avec lesquels on aimerait être ami, des adultes dont on dirait ce sont des belles personnes et je suis fière de ça. C’est vrai que ça demande de l’énergie. Ca on ne va pas se le cacher. Etre parent, éduquer des enfants c’est sans doute le challenge le plus important que moi j’ai eu à vivre et que j’ai toujours à vivre aujourd’hui parce que ça nous repousse vis-à-vis de nos limites. Et émotionnellement, ça bouscule beaucoup et on ne sait pas toujours sur quel pied danser.