Sans punir ou lever le ton, comment faire ?

Le métier de parent apparaît de plus en plus exigeant… Non seulement nous ne devons pas laisser nos enfants prendre tout pouvoir, mais nous devons également les respecter, veiller à ne pas les blesser, construire leur confiance en soi… Comment assumer notre rôle de parent nourricier et en même temps, faire en sorte que nos enfants ne prennent pas tout pouvoir, aient des « limites et un cadre pour grandir » ? Et en plus, ces limites doivent être posées avec bienveillance, c’est-à-dire que nous devons faire en sorte qu’elles ne puissent pas entraver l’estime de soi des enfants ! « Mais dites-moi sans punition, ni cri, comment faisons-nous pour, à la fois construire des enfants exemplaires et en même temps, les froisser le moins possible ? »

Est-ce possible ?

C’est la première question que nous nous posons, après avoir lu un article de parentalité positive exposant les méfaits des punitions ou des cris sur les enfants. Cela nous semble impossible, car pour la plupart d’entre nous, nous ne connaissons pas d’autres schémas. C’est tout le défi de notre génération. De la même façon, les générations précédentes ont dû apprendre qu’on ne pouvait pas asservir un individu au prétexte de la couleur de sa peau, notre génération doit apprendre comment accompagner ses enfants sans cri ni punition.

Bien entendu, nous ne sommes pas tous égaux dans cette entreprise, il sera plus facile de nous débarrasser des punitions corporelles et des cris si nous-mêmes n’en avons pas été victimes. Les bébés apprennent juste en observant. Dès qu’un tout petit perçoit quelque chose de manière régulière, les cellules de son cerveau changent pour se programmer à agir de la même manière. C’est pourquoi parfois, nous voyons surgir d’on ne sait où, des pulsions de violence qui se manifestent par des cris et qui se révèlent avec l’arrivée d’un enfant, le premier ou le dernier. Il nous appartient par conséquent de nous déprogrammer afin que cette manière d’agir avec les enfants disparaisse de génération en génération.

Rien ne sert de culpabiliser pour nos faux pas. Voyons le côté positif, ce ne sont que quelques bémols dans un bel élan, dans une prise de conscience collective d’une génération qui lutte contre les pratiques malheureusement ancrées du passé. Il ne s’agit pas de minimiser les maltraitances, mais bien de relativiser le cri lancé trop vite ou le geste un peu trop dur qui s’est produit. Nul n’est parfait et les évènements peuvent jouer sur notre comportement. Soyons déjà fiers de vouloir inverser la tendance et même si ce n’est pas encore tout à fait acquis, respectons et honorons l’apprenti en devenir que nous sommes.

Soyons remplis de gratitude et non de culpabilité lorsque les cris et les punitions deviennent seulement exceptionnels et représentent quelques faux pas. Même si le chemin peut s’avérer plus ou moins facile pour les uns et les autres en fonction de nos héritages, le seul fait de prendre conscience qu’il existe d’autres solutions est déjà un énorme progrès en soi.

Comment faire ?

En fait, il existe des solutions alternatives. Encore faut-il les soupçonner d’exister ?

Au lieu de céder à la colère, laissons là nous traverser et préférons-lui d’autres solutions. Dire « stop » ou « non » fermement sans lever le ton, ni froncer les sourcils, quitte à maintenir fermement, mais en douceur la main du petit bonhomme qui pour la 6e fois, voire plus, essaye de mettre les doigts dans la prise, est une alternative ! Le plus difficile consistera à ne pas céder pour faire comprendre qu’aucune dérogation n’est possible.

Mieux vaut parler de manière positive et remplacer « on ne court pas » par « au bord de la piscine, on marche ». Les plus petits ne peuvent pas comprendre les phrases négatives. Si nous leur disons « ne monte pas sur le canapé », ils ne retiennent que « monte » et « canapé ». C’est vrai aussi pour les adultes. Si je vous dis de ne pas penser à un éléphant rose, à quoi pensez-vous à cet instant ? Pourtant, j’insiste, ne pensez surtout pas à un éléphant rose assis en face de vous. Imaginez l’effet de vos négations sur vos enfants à présent : « n’écris pas sur la table, ne met pas ton verre au bord de la table, ne laisse pas trainer tes chaussures… » Bannissez les négations de votre vocabulaire et vous verrez de grands changements.

Lorsqu’un enfant nous tape, nous pouvons expliquer que ça ne nous convient pas, que ça nous fait mal au lieu de l’accabler avec des  « tu » qui accusent et qui collent des étiquettes (tu es méchant, tu me fais mal, tu es insupportable, tu es mal élevé…). Ne vaut-il pas mieux dissocier le geste de l’enfant : j’ai eu mal, je n’aime pas les coups, la violence est interdite…

Aimer inconditionnellement

Ce que l’on nous a rarement transmis et donné c’est de l’amour inconditionnel. Enfant, nous avons vite compris que nos parents nous donnaient leur attention et leur amour en fonction de nos comportements. Du coup, nous avons pensé ne pas toujours mériter leur amour. Les punitions donnent ce sentiment à un enfant. Je ne mérite pas d’aller au parc parce que je n’ai pas rangé ma chambre. Je ne mérite pas de câlin parce que j’ai frappé ma petite sœur. Plus notre comportement dérangeait nos parents et moins nous avions d’affection. Plus notre bulletin de notes était mauvais et plus nous devions montrer patte blanche pour obtenir quelques signes d’amour et de reconnaissance.

Or, nous devons réapprendre à agir exactement de manière inverse et tenter de nous rappeler que plus nos enfants se comportent « mal », plus nous devons leur apporter amour, sécurité et attention. Un enfant en colère a tendance à nous faire fuir. Plus il crie, tape, se roule par terre et moins nous avons envie de le serrer dans nos bras. Et pourtant, c’est justement ce dont il a besoin et encore plus à ce moment précis. Plus nous accueillerons son mauvais comportement (y compris les pires !) avec compréhension, pardon, et empathie et plus vite la situation s’apaisera. Il ne s’agit pas de tout tolérer, mais lorsque l’enfant est en crise, il n’est pas en mesure d’être raisonné. Aidons-le à se calmer puis nous pourrons revenir sur les faits et dire avec fermeté que tel acte est inacceptable. Lui en vouloir revient à le maintenir dans la culpabilité, laquelle génèrera de la colère contre lui et celle-ci ne manquera pas de se retourner contre l’autre. C’est donc un cercle vicieux infernal. Pardonnez aux enfants leurs écarts de conduite simplement parce que ce sont des enfants et que nul n’est parfait. Nous devrions toujours parler à nos enfants comme s’il s’agissait de notre meilleur ami.

Déterminé à ce que vous lui achetiez un bonbon, votre enfant s’oppose violemment à votre refus. Du coup, il se roule par terre, vous frappe et dit quelques gros mots au beau milieu d’une boulangerie pleine de clients. Il vous empêche de sortir de la boulangerie alors que vous avez des paquets plein les mains, il tire sur votre vêtement et manque de vous faire tomber. Avouons qu’à ce moment-là, rares sont ceux d’entre nous qui ne « détestent » pas leur enfant : c’est la honte ! Et bien c’est justement dans ces pires moments qu’il faut faire taire notre petite voix « de quoi as-tu l’air comme maman là » ? Pour se concentrer sur l’amour à porter à notre enfant. Apparemment, il tient vraiment à ce bonbon !

… soit nous sommes dans un jour où nous n’avons pas le temps ni la possibilité d’accueillir ni d’écouter et exceptionnellement nous achetons ce bonbon. Ce n’est pas parce que nous cédons une fois, que nous céderons toujours et peu importe ce qu’en pensent la boulangère et le public présent, respectez ce jour-là votre besoin d’arriver à l’heure à votre rendez-vous sans culpabiliser et sans vous coller une étiquette de maman ou papa qui ne sait pas se faire respecter.

… soit nous attendons que l’orage passe… En gardant notre calme, nous regagnons la maison tant bien que mal et si nécessaire par la fermeté, mais toujours en douceur. La manière dont nous conduisons ou menons de force un enfant à un endroit peut aussi en dire long sur notre colère et sur ce que nous pensons de notre enfant sans le nommer. Notre regard et notre façon de tenir ou de porter notre enfant peuvent à eux seuls lui indiquer que c’est une mauvaise personne. Essayons de nous calmer, de faire abstraction du regard des autres, de nous convaincre que nous n’avons pas produit « un enfant roi » et que ceci va bientôt se terminer. Prenons ensuite l’enfant dans nos bras pour chercher à comprendre « que se passe-t-il, quelque chose ne va pas, ta journée s’est mal passée, tu es fatigué, de quoi as-tu besoin ? » Contre toute attente, faites-lui un câlin alors qu’il se croit détestable et dites-lui surtout que vous comprenez sa terrible envie de bonbon. Il ne s’agit pas de lui dire que ce qu’il a fait est bien ou mal, mais bien de lui expliquer que son geste et son comportement sont intolérables, que ça ne lui ressemble pas, mais que vous lui pardonnez et que vous lui faites confiance pour l’avenir, dans le sens où vous savez que bientôt il arrivera à gérer sa colère autrement.

Laissons-le exprimer sa colère, ne l’obligeons pas à la refouler, la colère est une émotion saine et nécessaire, la refouler ne fera que la reporter à plus tard. N’apprenons pas à nos enfants à masquer leur colère, mais à la laisser s’extraire sans la faire subir aux autres et pour cela soyons un exemple.

Puis, quand notre enfant aura retrouvé son calme, nous pourrons lui expliquer pourquoi il est interdit de taper, pourquoi nous ne pouvons pas acheter des bonbons tout le temps. Nous devons surtout dire ce que cela nous fait « Je me sens » ou « cela m’a fait mal » ou « cela m’inquiète », mais oublions les accusations et culpabilisations qui ne font qu’envenimer les choses et incitent à la récidive « tu es méchant, tu me fais honte…».

Ainsi, l’enfant intégrera les interdits et l’intérêt de donner son ressenti. L’enfant ne peut pas encore gérer ses émotions, car c’est physiologiquement impossible pour lui. Plus vite nous accompagnerons nos enfants de manière bienveillante et plus vite, ils sauront exprimer et gérer leurs émotions.

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