Mon enfant s’ennuie. Que faire ?
Vous avez un enfant qui se plaint, qui vous dit qu’il s’ennuie. Alors, il y a deux choses avec l’ennui. Il y a les parents qui occupent énormément les enfants parce qu’eux-mêmes ont peur que les enfants s’ennuient. Puis il y a des parents qui ont des enfants qui se plaignent souvent de s’ennuyer et cela fait énormément culpabiliser les parents.
On est dans une société du « faire ». Cela, c’est sûr. Il faut faire, il faut être productif, etc. On ne nous a pas appris à être, on nous a appris à faire, dès tout-petit, dès l’enfance. On nous occupe. Il faut être occupé et c’est presque culpabilisant d’avoir passé une journée à ne rien faire, alors que c’est très nourrissant.
Les asiatiques ont une autre vision du silence, du « rien faire », de l’écoute, de l’intériorisation, de passer du temps de silence, de méditation, de repli sur soi, etc. Ils n’ont pas du tout la même vision. Mais dans nos sociétés occidentalisées, on est dans « le faire », le faire, le faire et le faire encore plus.
Première chose, on va parler du premier cas qui est : quand on cherche à beaucoup occuper les enfants, justement de peur qu’ils s’ennuient. Déjà on ne leur laisse pas d’espace pour être, d’espace pour rêver, d’espace pour créer, d’espace pour explorer et expérimenter.
Quand un enfant est trop occupé : parce qu’il y a des enfants qui ont des emplois du temps de ministre. Ils se lèvent le matin. Ils prennent leur petit déjeuner. Ils s’habillent. Ils prennent leur cartable. On les pose à l’école. Ensuite, il y a la cantine. On va les chercher à 4 heures 30. On les ramène. Ils prennent un goûter sur le pouce quand ils ont le temps. Ensuite, il y a solfège de telle heure à telle heure. Après solfège, il y a les devoirs. Après les devoirs, il faut faire le bain. Après le bain, il faut lire un peu. Après lire, il faut se coucher. Et on est reparti le lendemain, et là on fait piscine. Le mercredi, on fait de l’anglais. Le jeudi, on fait du tennis, etc. J’exagère et je grossis un peu le trait, mais cela existe.
Moi, j’ai vu des enfants qui était surbookés, sans compter les cours particuliers pour remettre à niveau, les devoirs en plus que les parents peuvent donner parce qu’ils ont peur que les enfants aient des lacunes et pour remettre à niveau également, soit avec des professeurs, soit les devoirs qui s’éternisent à la maison. Les enfants n’ont plus d’espace dans nos sociétés pour s’ennuyer. C’est ce qu’on dit : « s’ennuyer ».
Alors, cela me permet de rebondir sur la deuxième chose, quand un enfant s’ennuie, quand mes filles me disent qu’elles s’ennuient, je leur dis : « C’est génial ! Tu as de la chance. Tu vas pouvoir faire tout ce que tu veux. Cela veut dire qu’il n’y a rien pour l’instant et tu vas pouvoir te centrer sur toi. Moi je te conseille d’aller t’allonger sur ton lit, de fermer les yeux et de respirer jusqu’à ce qu’une idée te vienne. »
J’ai remarqué cela parce que je n’ai jamais répondu à l’ennui de mes enfants. Pourquoi ? Je vais vous raconter quand-même cette petite anecdote – avec mon livre, on n’est plus à cela près des confidences sur ma vie. Quand j’étais petite, je me suis énormément ennuyée. Pourquoi ? Parce que j’étais énormément punie.
J’étais punie, en plus cloîtrée dans ma chambre, avec des livres que j’avais déjà lus cent fois. À l’époque, on n’avait pas trop de jouets, donc je n’avais pas grand-chose et je m’ennuyais énormément. C’est ce qui a fait que j’ai joué à la Barbie jusqu’à l’âge de 16 ans parce que j’ai inventé des histoires avec cette Barbie. Je lui faisais vivre mille et une aventures et cela me permettait de m’évader.
En fait, je me suis rendu compte de la richesse intérieure que cela avait pu développer chez moi. Cela m’a donné d’abord l’occasion de trouver des alternatives à l’ennui. J’ai appris à coudre, j’ai dessiné. J’ai nourri un monde créatif très riche. Je faisais beaucoup de choses avec les mains. J’adorais les travaux manuels. Je bricolais. Je construisais. Je recommençais. Je refaisais.
Donc tout cela, ce sont des choses qui permettent de développer énormément ses capacités manuelles, mais pas que , intellectuelles aussi, parce qu’on fait des mathématiques avec certaines activités, on fait de la géométrie. On fait des tas de choses et donc cela permet de développer la richesse de son monde intérieur.
Également, cela m’a permis de développer un monde intérieur très riche, c’est-à-dire de pouvoir me connecter à moi, à mes sensations, à mes émotions et donc d’être très proche de moi-même et c’est important aussi. Le bilan de ces années de punitions, c’est qu’en fait si je n’avais pas eu tout cela, cela ne m’aurait pas permis de développer cette capacité que j’ai à entrer en moi, à y rester et à y être en paix ; et surtout à trouver des idées, à être créative, à avoir développé également mon intuition. Cela, c’est très important parce que c’est un facteur de guidance fondamental.
Laissez donc vos enfants s’ennuyer parce que vous allez voir que vous allez leur laisser de l’espace. De l’espace pour quoi ? De l’espace pour « être » tout simplement. Et croyez-moi, c’est très important. Regardez aujourd’hui, on nous apprend les bienfaits de la méditation, du yoga, de tout cela, du mieux-être, cela passe par une connexion à l’être, une connexion à soi et justement sortir du « faire » pour mieux revenir dans le corps.
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